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17 octobre 2016

Les propositions au sujet des travailleurs étrangers sont un autre coup dur pour la classe moyenne du Canada

Par Joseph Maloney

Voulons-nous vraiment vendre nos emplois canadiens bien rémunérés au plus bas soumissionnaire? Voulons-nous actuellement externaliser notre travail hautement spécialisé à des pays qui ne respectent pas nos normes de sécurité ou de formation?

Le rapport longuement attendu du Comité des ressources humaines de la Chambre des Communes sur les changements au programme de travailleurs étrangers temporaires (PTET), publié lundi, ajouterait une autre brique à la structure dangereuse qui, si on l'adopte, transformera la force ouvrière du Canada et d'une façon non positive.

Les changements proposés au PTET, combinés aux les efforts des Libéraux d'adopter l'accord commercial Partenariat Trans-Pacifique (PTP) et d'apporter des changements importants à l'immigration, vont engendrer une pression à la baisse des salaires des travailleurs qualifiés du Canada et perpétuer le rôle des McEmplois à bas salaires dans notre économie.

Laissez-moi dire en entrée de jeu que notre syndicat a utilisé correctement le PTET. La chaudronnerie est un métier spécialisé qui requiert un apprentissage de quatre ans et au cours des dernières années, nous avons été incapables de trouver suffisamment de Chaudronniers qualifiés au Canada pour combler la demande. Nous avons donc utilisé les TET dans les situations où des travaux importants, tels les fermetures d'entretien régulières d'immenses complexes énergétiques, ne pouvaient être complétés autrement.

Notre PTET en est un avec une différence. Nous n'utilisons pas de courtiers de main-d'œuvre qui forcent les travailleurs à payer une commission. Nous nous assurons que nos employeurs payent pour le transport et le logement des travailleurs dont ils ont besoin. Tous les TETs qui travaillent avec nous reçoivent le taux de salaire syndical ainsi que tous les avantages sociaux prévus dans nos conventions collectives, y compris les contributions au régime de retraite et de santé.

Priorité aux Canadiens

Lorsque notre syndicat a entendu parler des plans du gouvernement de reculer des réformes au PTET proposées en 2014, nous nous sommes fortement objectés. À notre avis, les Canadiens méritent d'être considérés en premier lieu pour tous les emplois pour lesquels nous utilisons des TETs. Lorsque nous les utilisons, nous croyons que les TETs devraient recevoir le même salaire que les Canadiens, ils ne devraient pas être utilisés comme travailleurs à rabais pour remplacer nos citoyens.

Mais le gouvernement semble se soumettre aux intérêts corporatifs qui veulent diminuer leur fardeau salarial et accroître leurs profits. Ils proposent de doubler la proportion de travailleurs étrangers pouvant être embauchés par une compagnie. Au lieu d'augmenter les salaires pour attirer des travailleurs canadiens, le gouvernement veut relâcher les règlements qui empêchent les compagnies d'utiliser les travailleurs pour réduire leur coûts de main-d'œuvre.

Tout en prétendant faire un effort pour protéger les droits de la personne des travailleurs étrangers, le comité des Communes propose un changement qui réduirait encore plus leur statut. En éliminant les permis spécifiques à un employeur, ils permettent à des courtiers et des intermédiaires sans scrupules d'importer ce qui peut être une armée de travailleurs à bas salaire qui attendront dans les coulisses sans revenus jusqu'à ce que quelqu'un décide de les utiliser. Nous avons vu cette pratique utilisée dans l'industrie de la construction, d'accepter cette proposition signifierai que nous l'endossons.

Nous voyons quelques bonnes recommandations dans le rapport du comité. Nous avons longuement suggéré que les employeurs honnêtes qui suivent les règles et qui n'utilisent pas le PTET comme source de travailleurs à bon marché, devraient avoir accès à un traitement accéléré. Nous croyons fortement que l'on pourrait faire davantage pour améliorer l'accessibilité à la formation dans les régions éprouvant des pénuries de main-d'œuvre.

Mais même à ce chapitre, le rapport du comité s'avère un effort échevelé et irréfléchi. Nos propres programmes d'apprentissage par exemple sont surpeuplés parce qu'il n'y a pas suffisamment d'institutions éducationnelles accréditées, qui relèvent de la responsabilité des provinces. Il est facile de dire que l'on doit avoir plus de coopérations entre le gouvernement fédéral et les provinces mais que doit-on faire pour y arriver. Le comité se contente de laisser à d'autres la tâche de régler ce problème.

Totalement inadéquat

Comme l'ont soulevé les députés conservateurs et néo-démocrates, le temps passé à préparé ce rapport a été totalement inadéquat. Le comité n'a siégé que cinq fois, dont certaines ont été écourtées. Les témoins n'avaient pas le temps de faire entendre leur témoignage en entier et plusieurs n'ont même pas pu témoigner.

Ce rapport n'est pas assez bon pour les Canadiens. Si l'on ajoute les dispositions du PTP et les contrôles encore plus faibles sur l'embauche de travailleurs étrangers sous le Programme de mobilité internationale, on ouvre la porte à une autre attaque sur notre classe moyenne, le groupe même que les Libéraux avaient promis de défendre lors de la dernière campagne électorale.

Avec les ratés de notre économie, c'est le mauvais moment d'attaquer les revenus des travailleurs. Si le Comité avait de l'intégrité, il retirerait son rapport et donnerait au dossier des travailleurs étrangers toute l'attention qu'il mérite.

(Joseph Maloney est le vice-président international pour le Canada de la Fraternité internationale des Chaudronniers)


Cet article a été publié dans The Hill Times du 17 octobre.