Capture du carbone : vision au-delà du court-terme

L’article suivant a été publié dans le Estevan (SK) Mercury le 24 janvier 2018

Par Joseph Maloney

Si jamais nous avions besoin d’une perspective élargie dépassant l’avantage politique, le débat actuel sur la capture et le stockage du carbone (CSC) est le bienvenu.

La conférence COP 23 en Allemagne, une suite à la conférence des Nations Unies sur les changements climatiques de 2015 à Paris, à remis de nouveau la question du réchauffement global au centre du débat public. Mais les progrès réels ont été difficiles à réaliser.

Le Canada s’est engagé de se joindre à 20 autres pays dans une déclaration que nous cesserions d’utiliser le charbon pour générer de l’électricité par 2030. Le Canada contribue moins de 1% des émissions globales causées par le charbon. Les grands pays utilisant le charbon – La Russie, la Chine, l’Allemagne, les États-Unis et l’Inde – ne se sont pas joints à la coalition.

Malgré le fait que le charbon produit deux fois plus d’émissions qu’une usine au gaz naturel du même âge, il est néanmoins peu coûteux et abondant dans plusieurs pays. C’est pourquoi il n’est pas à veille de disparaître malgré les engagements du Canada et des autres pays qui ne l’utilisent pas beaucoup.

Quel est le meilleur moyen de réduire les émissions de charbon des usines de génération d’électricité? Pour les pays en voie de développement, les bénéfices d’utiliser le charbon sont évidents. Pour ces pays, la capture du carbone les aidera à rencontrer leurs cibles environnementales.

Nouvelle perspective sur la CSC

Qu’est-ce que tout cela a à voir avec la Saskatchewan? Cela touche le débat sur le charbon et la capture de carbone de deux façons : premièrement en donnant une nouvelle perspective sur les mérites de la capture du carbone et deuxièmement, en nous montrant les implications globales positives de continuer à utiliser et développer la CSC.

L’efficacité de la CSC ne fait aucun doute. Le projet Boundery Dam de la Saskatchewan élimine 90% des émissions de gaz à effet de serre de la génération d’électricité au charbon et 100% du dioxyde de soufre qui cause les pluies acides. Étant le premier projet au monde à cette échelle, il a connu des problèmes de départ coûteux. Mais l’usine fonctionne bien maintenant et a capturé environ 85 000 tonnes de carbone en octobre dernier qui auraient autrement été relâchées dans l’atmosphère.

Malheureusement, le charbon avec la CSC ne représente que 4% de la génération d’électricité de la Saskatchewan selon SaskPower. Le charbon sans la CSC en génère 40% et le gaz naturel 36%. L’énergie éolienne ne représente que 3%.

Est-il sage d’accroître notre dépendance sur des sources de carburant importées tel le gaz naturel pour générer notre demande d’électricité de base? Devrions-nous se fier à une seule source pour générer 76% de notre électricité, en particulier sur une ressource connaissant d’importantes fluctuations de prix? Devons-nous sacrifier des milliers d’emplois de construction, d’entretien, d’extraction et de transformation du charbon en Saskatchewan?

Ce sont des questions importantes parce qu’en ce moment, la Saskatchewan ne peut pas compter sur la génération hydroélectrique, éolienne ou solaire pour rencontrer ses besoins de base. Comme le réalise maintenant l’Ontario après avoir englouti des milliards de dollars dans l’énergie solaire et éolienne, les méthodes renouvelables autres que l’hydroélectricité ne sont pas assez fiables pour remplacer la génération nucléaire, au charbon et au gaz naturel.

Le charbon peut être plus propre

Les critiques du CSC affirment qu’il en coûte moins cher pour réduire les émissions de remplacer le charbon par le gaz nature. Mais même les usines les plus modernes au gaz naturel génèrent de trois à quatre fois plus d’émissions que le charbon avec la CSC. Et la grande partie du gaz naturel de la Saskatchewan est produit par fracturation qui inquiète beaucoup plus les environnementalistes que le charbon propre.

La seule raison de préférer le gaz au charbon avec CSC s’avère être l’argent. Et les 940$ millions déboursé par la province pour l’installation de CSC au projet de Boundary Dam est une grosse cible. Mais cette cible devient beaucoup plus petite lorsque l’on considère que le coût sera réparti sur 30 ans et que le prix du charbon ne changera pas durant cette période. La CSC devient moins coûteuse et plus efficace avec chaque nouvelle installation.

Le raisonnement basé sur l’argent s’effondre sur la base macroéconomique et environnementale.

Combien de revenus d’impôts sont payés dans les coffres provinciaux par les milliers de travailleurs miniers, de construction et d’entretien à long terme de l’industrie du charbon en Saskatchewan? L’aide sociale coûtera beaucoup plus cher s’ils doivent y recourir. Et ce, sans compter les coûts aux entreprises e aux communautés.

D’un côté positif, l’électricité générée au charbon avec CSC est sensiblement aussi propre que les sources renouvelables. La CSC a créé des centaines d’emplois de haute technologie bien rémunérées en Saskatchewan et peut en créer des centaines de plus. La CSC nous permettra d’atteindre nos cibles de carbone et de fait, nous ne les atteindrons pas sans elle. Le Canada peur devenir un leader mondial dans l’exportation de la technologie de CSC vers d’autres pays si nous ne perdons pas notre avance qui diminue rapidement à cause de la vision de certains critiques basée sur l’avantage politique à court-terme et sur les signes de dollars.

(Joseph Maloney est le vice-président international pour le Canada de la Fraternité international des chaudronniers)